Des molécules « impossibles » défient une règle centenaire de la chimie
- vanessa-alexandra rault
- 11 janv.
- 3 min de lecture
Depuis un siècle, la règle de Bredt limitait le champ de vision des chercheurs en chimie organique. Des chercheurs ont désormais montré qu’il était possible de s’en émanciper , un progrès qui pourrait ouvrir la voie à la découverte de nouvelles molécules à fort potentiel.
Depuis un siècle, la règle de Bredt limitait le champ de vision des chercheurs en chimie organique. Des chercheurs ont désormais montré qu’il était possible de s’en émanciper – un progrès qui pourrait ouvrir la voie à la découverte de nouvelles molécules à fort potentiel.
Le carbone est un élément indissociable de la vie telle qu’on la connaît sur Terre. Grâce à sa capacité à se lier durablement à des tas d’autres éléments, cet atome est la colonne vertébrale d’un tas de composés complexes qui jouent un rôle absolument crucial dans notre existence, des protéines aux acides nucléiques en passant par les lipides et les enzymes.
Depuis plus de deux siècles, il s’est donc retrouvé au centre d’une discipline scientifique à part entière : la chimie organique, qui est centrée sur l’étude de la structure et de la dynamique des composés à base de carbone. C’est à travers elle que d’éminents chercheurs nous ont permis de comprendre comment fonctionne une grande partie du monde qui nous entoure, avec des implications majeures pour des tas d’autres disciplines.
Une règle centenaire…
Cette nouvelle étude, publiée dans le prestigieux journal Science, est centrée sur la règle de Bredt. Cette dernière porte sur la structure de certains composés carbonés particuliers. Pour la comprendre, il faut d’abord se pencher sur la façon dont les atomes se lient entre eux.
En règle générale, pour s’unir au sein d’une molécule, ils ont souvent recours à ce que l’on appelle une liaison covalente. Ils mettent chacun l’un de leurs électrons en commun, et s’attirent alors entre eux sous l’effet de la force électrostatique. Ces liaisons peuvent être simples, mais aussi doubles ou même triples ; dans ce cas, les deux atomes partagent non pas une, mais deux ou trois paires d’électrons. On obtient alors une liaison solide qui rend la structure plus rigide, puisque cela l’empêche de pivoter autour de cet axe.
Mais ces doubles liaisons ne peuvent pas exister n’importe où. C’est notamment le cas dans certaines molécules qui contiennent de petits éléments cycliques, que l’on peut visualiser comme des “cercles” d’atomes fermés. La règle de Bredt stipule justement que ces doubles liaisons ne peuvent pas exister à l’intersection de ces éléments cycliques. Autrement, on obtiendrait une structure distordue et complètement instable, et par extension impossible à synthétiser en pratique.
…faite pour être transgressée
Techniquement, cela n’a jamais été prouvé rigoureusement ; la règle de Bredt est essentiellement empirique. Elle s’est tout de même révélée extrêmement solide depuis son introduction il y a un siècle, à tel point qu’elle s’est imposée comme un grand classique des manuels de chimie organique… et pourtant, elle semble désormais invalidée par les chercheurs d’UCLA. Dans leur dernière étude, ils ont en effet réussi à synthétiser différents types de molécules qui violent allègrement la règle de Bredt. Chacune d’entre elles présente en effet une de ces fameuses doubles liaisons à la jonction entre deux cycles, mais reste parfaitement stable, contrairement à ce que stipule la règle.
Pour les auteurs, c’est une démonstration claire que ces “règles” ne doivent pas être prises au pied de la lettre. Ils y voient même un exemple criant de l’importance de s’en émanciper pour faire progresser la recherche fondamentale.


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